La loi du 20 novembre 2025 portant notamment modification du Code de la consommation (lien vers la loi : Legilux public) transpose en droit luxembourgeois la directive (UE) 2020/1828 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2020 relative aux actions représentatives visant à protéger les intérêts collectifs des consommateurs. Entrée en vigueur le 25 novembre 2025, elle s’applique (rétroactivement) aux recours collectifs (class actions) initiés à partir du 25 juin 2023 (date d’applicabilité de la directive 2020/1828).
Le recours collectif est intégré dans un nouveau Livre 5 du Code de la consommation aux articles L. 511-1 et suivants.
Il peut être exercé en justice en cas d’atteinte aux intérêts individuels de plusieurs consommateurs placés dans une situation similaire ou identique subissant un dommage causé par un même ou par plusieurs professionnels :
Le recours collectif peut être exercé soit pour faire cesser ou interdire ces manquements, soit pour engager la responsabilité du professionnel ayant causé le dommage afin d’obtenir réparation des préjudices subis, soit pour poursuivre ces deux buts.
Le recours collectif peut être initié par les seules entités qualifiées définies à l’article L. 511-4 du Code de la consommation (comme, par exemple, la Commission de surveillance du secteur financier ou la Direction de la Santé), à l’exclusion des personnes physiques. Il doit être intenté devant le tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg siégeant en matière commerciale.
L’assignation doit mentionner expressément, sous peine de ité :
Les sources de financement de l’action introduite par l’entité qualifiée doivent également être renseignées sur un document séparé pour démontrer l’absence de conflits d’intérêt.
Le tribunal statue sur la recevabilité de l’action au regard des conditions énumérées à l’article L. 521-1 du Code de la consommation, lesquelles sont les suivantes :
Le jugement sur la recevabilité ou l’irrecevabilité détermine les modalités de publicité nécessaires à l’information des consommateurs et la décision définitive sur la recevabilité ou l’irrecevabilité est publiée dans son intégralité sur le site internet du ministère ayant dans ses attributions la protection des consommateurs.
La loi du 20 novembre 2025 précise que les principes généraux de la médiation en matière civile et commerciale s’appliquent si les parties décident de recourir à la médiation. Les mentions à comprendre dans l’accord de médiation, qui doit être total, sont énoncées par la loi nouvelle et l’accord devra être homologué. Les honoraires du médiateur, qui doit être un médiateur agréé, sont pris en charge par le budget de l’État, ce qui constitue une incitation au règlement amiable.
Si les parties ne parviennent pas à un accord de médiation dans les délais et conditions fixés par le tribunal ou si elles ont décidé de ne pas avoir recours au processus de médiation, le tribunal poursuit l’examen du recours collectif.
Lorsque le recours collectif tend à la réparation des préjudices subis, le tribunal statue sur la responsabilité du professionnel au vu des cas individuels. Il définit le groupe de consommateurs à l’égard desquels la responsabilité du professionnel est engagée, les catégories de préjudices susceptibles d’être réparés et le système d’option applicable, qui peut être par inclusion au groupe (opt in) ou par exclusion du groupe (opt out). Le tribunal désigne un liquidateur qui accomplira toutes les démarches et missions nécessaires au bon déroulement de la mise en œuvre du jugement sur la responsabilité ou de l’accord de médiation homologué, le cas échéant.
Lorsque le recours collectif tend uniquement à la cessation ou à l’interdiction d’un manquement, le tribunal, s’il en constate l’existence, rend un jugement pour interdire au professionnel ou lui enjoindre de cesser ou de faire cesser ledit manquement et de prendre, dans un délai qu’il fixe, toutes les mesures utiles à cette fin, provisoires ou définitives, sous peine d’astreinte, et au besoin avec l’aide d’un tiers qu’il désigne.
Lorsque le recours collectif tend à engager à la fois la responsabilité du professionnel pour les préjudices subis et la cessation ou l’interdiction d’un manquement, le tribunal, s’il constate l’existence d’un manquement, rend d’abord un jugement séparé pour interdire au professionnel ledit manquement ou lui enjoindre de le cesser ou de le faire cesser et de prendre, dans un délai qu’il fixe, toutes les mesures utiles à cette fin, provisoires ou définitives, sous peine d’astreinte et au besoin avec l’aide d’un tiers qu’il désigne.
S’agissant du recours collectif qui tend à la réparation d’un préjudice subi, le liquidateur remet un rapport final au tribunal une fois que les consommateurs concernés ont été indemnisés par le professionnel.
S’agissant du recours collectif qui tend uniquement à la cessation ou l’interdiction d’un manquement, tout manquement aux injonctions ou interdictions portées par le jugement prononcé et coulé en force de chose jugée est puni d’une amende de 251 euros à 50 000 euros. Lorsque les faits sur lesquels porte la décision judiciaire coulée en force de chose jugée sont susceptibles d’être qualifiés de délit pénal, l’amende est de 251 euros à 120 000 euros.
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Les développements qui précèdent résument les principaux mécanismes du recours collectif introduit dans le Code de la consommation et ne sauraient constituer un résumé exhaustif de l’intégralité des modifications apportées par la loi du 20 novembre 2025 au Code de la consommation.
Cette évolution législative, malgré le retard pris pour transposer la Directive 2020/1828 constitue une avancée significative dans la modernisation de la protection des consommateurs au Luxembourg et permet aux procédures nationales d’être alignées sur les normes européennes en matière de recours collectifs.
Lors du premier vote constitutionnel du projet de loi le 30 octobre dernier, la Chambre des députés a souligné que l’expérience des autres États membres a montré que la mise en œuvre pratique du recours collectif soulève des questions importantes relatives à l’accès effectif à la justice, à la complexité de la procédure et a invité le Gouvernement à procéder, dans un délai de cinq ans à compter de l’entrée en vigueur de la loi, à une évaluation complète de la mise en œuvre du recours collectif au Luxembourg afin d’en mesurer l’efficacité et d’identifier d’éventuelles adaptations législatives.