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NEWSFLASH – Entrée en vigueur de la loi du 30 mars 2022 relative aux comptes inactifs, aux coffres-forts inactifs et aux contrats d’assurance en déshérence
Posted on 1 June 2022 in News > Banking & Finance > Insurance

Introduction

Jusqu’à ce jour, le Grand-Duché de Luxembourg ne s’était jamais doté d’une loi relative à la dormance ainsi qu’à la déshérence dans le secteur financier.

Grâce à la loi du 30 mars 2022, entrée en vigueur en date du 1 juin 2022, c’est désormais chose faite.

Cette nouvelle loi s’inscrit dans une triple démarche de renforcement :

  • de la protection des épargnants et bénéficiaires de certaines prestations d’assurance par le biais d’une facilitation dans leur chef de la recherche de leurs comptes, leurs éventuels coffres-forts et des contrats d’assurance stipulés en leur faveur ;
  • de la sécurité juridique pour les professionnels en précisant les obligations auxquelles ils sont soumis ; et
  • du cadre légal visant à la prévention de la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme par le biais de la mise en place obligatoire par les professionnels de mesures visant à prévenir la déshérence des contrats d’assurance et l’inactivité des comptes et des coffres-forts.

 

Champ d’application

La loi du 30 mars 2022 a pour vocation à s’appliquer aux comptes inactifs, aux coffres-forts inactifs et aux contrats d’assurance en déshérence.

  • Ratione materiae

Par « coffre-fort », il faut comprendre tout (compartiment) de coffre-fort ou autres emplacements sécurisés mis à disposition par un établissement (article 1, 4°).

Par « compte », il faut comprendre « tout compte à vue, compte d’épargne, compte de dépôt à terme ou remboursable avec préavis, compte-titres, dépôt fiduciaire ainsi que tous autres comptes ouverts auprès d’un établissement. Est également visé tout compte clôturé pour lequel l’établissement demeure encore dépositaire des avoirs y déposés ». En revanche, sont exclus les comptes de monnaie électronique au sens de la loi modifiée du 10 novembre 2009 relative aux services de paiement (article 1, 5°).

Par « contrat d’assurance », il faut comprendre « un contrat d’assurance au sens de la loi modifiée du 27 juillet 1997 sur le contrat d’assurance, ou tout contrat considéré comme contrat d’assurance ou de capitalisation par la loi applicable au contrat » (article 1, 6°).

  • Ratione personae

La loi s’applique respectivement aux « entreprises d’assurance » ainsi qu’aux « établissements » en les soumettant à diverses obligations dans le contexte des comptes, coffres-forts et contrats d’assurance et de leur éventuelle inactivité ou déshérence.

La notion d’entreprise d’assurance vise toute entreprise d’assurance agréée au Luxembourg et toute succursale luxembourgeoise d’une entreprise d’assurance de droit étranger exerçant des opérations relevant de l’annexe II de la loi modifiée du 7 décembre 2015 sur le secteur des assurances[1].

La notion d’établissement inclut tout établissement de crédit agréé au Luxembourg, toute succursale luxembourgeoise d’un établissement de crédit étranger ainsi que l’Entreprise des postes et télécommunications du chef de ses prestations de services financiers postaux tels que définis par la loi modifiée du 15 décembre 2000 sur les services financiers postaux.

 

Point de départ de l’inactivité

La loi du 30 mars 2022 établit le point de départ de l’inactivité sur bases de critères différents en fonction du contrat qui fait l’objet d’inactivité (article 2).

Pour un compte, le point de départ de l’inactivité est le jour à partir duquel le titulaire n’a pas effectué d’opération au titre du compte, de tout autre compte ou coffre-fort détenu par lui auprès du même établissement et qu’il n’y a eu aucune manifestation, sous quelque forme que ce soit, de la part du titulaire auprès de l’établissement qui détient le compte.

Pour un coffre-fort, le point de départ de l’inactivité est le jour à partir duquel il n’y a eu aucune manifestation, sous quelque forme que ce soit, de la part du titulaire auprès de l’établissement qui détient le coffre-fort. La loi précise que le fait d’effectuer des opérations au titre d’un compte détenu auprès du même établissement constitue une manifestation.

Pour un contrat d’assurance, le point de départ de l’inactivité est le jour à partir duquel l’entreprise d’assurance a connaissance de l’exigibilité des prestations d’assurance dues en vertu du contrat et pour lequel aucun bénéficiaire n’a fait valoir un droit sur ces prestations d’assurance.

 

Nouveau régime applicable

Le nouveau régime, tel que présenté dans la loi du 30 mars 2022, se construit comme suit.

1. Les obligations des établissements

Les obligations légales des professionnels peuvent être classifiées selon trois volets bien distincts, à savoir :

– Le volet préventif :

Ce volet vise, d’une part, à définir des mesures prévenant et traitant l’inactivité des comptes et coffres-forts ainsi que la déshérence des contrats d’assurance et, d’autre part, à rétablir le contact par des procédures d’information et de recherches.

Les établissements et les entreprises d’assurance devront notamment appliquer des mesures de vigilance aux fins d’éviter qu’un compte ou un coffre-fort ne devienne inactif et de surveiller l’exigibilité des prestations d’assurance. Aussi, la loi impose aux assureurs et aux établissements de se doter de règles précises pour identifier et informer les bénéficiaires des contrats d’assurance/titulaires de compte ou de coffre-fort.

En outre, la nouvelle loi astreint les établissements et les assureurs à la mise en place d’une information des titulaires (voire, le cas échéant, leurs ayants droit) et bénéficiaires, potentiellement, à plusieurs reprises.

– Le volet consignation :

Ce volet vise à définir l’obligation de consigner les avoirs après une inactivité prolongée ainsi que les procédures particulières à suivre en matière de consignation.

Il débute après l’écoulement d’un certain laps de temps défini par la loi suivant le point de départ de l’inactivité. Ainsi, l’établissement et la compagnie d’assurance devront introduire une demande documentée de consignation auprès de la Caisse de consignation par le biais d’un dépôt électronique sur une plateforme étatique sécurisée.

Une fois les avoirs à consigner reçus en dépôt par la Caisse, cette dernière émettra un récépissé. La consignation n’est effective qu’à compter de l’émission du récépissé par la Caisse de consignation.

La consignation a pour effet d’entraîner la clôture des comptes et coffres-forts ainsi que la fin de la relation contractuelle entre les entreprises d’assurance et les preneurs d’assurance, nonobstant toute stipulation contractuelle contraire.

– Le volet reporting:

Ce volet vise à définir les informations que les professionnels devront fournir sur une base annuelle à leur régulateur respectif (à savoir la Commission de Surveillance du Secteur Financier (CSSF) pour les établissements et le Commissariat aux Assurances (CAA) pour les assureurs) ainsi qu’à l’Administration des contributions directes. Ces informations relatives à une année civile déterminée devront être transmises annuellement au plus tard le 28 février de l’année qui suit.

2. Les outils à dispositions des titulaires et des ayants droit

La nouvelle loi prévoit que la Caisse de consignation tiendra un registre électronique des consignations faites afin d’en permettre, le cas échéant, la consultation par des tiers. Ainsi, toute personne qui justifierait d’un droit sur des avoirs consignés aura la possibilité d’introduire auprès de la Caisse, par voie électronique ou postale, une demande d’information portant sur les inscriptions au registre relatives aux avoirs sur lesquels le demandeur fait valoir un droit, accompagnée d’informations et de pièces justificatives.

La personne justifiant d’un droit sur les avoirs consignés a également la faculté d’introduire une demande visant à la restitution de ces avoirs auprès de la Caisse de consignation. 

3. Les pouvoirs de la CSSF et du CAA

La CSSF et le CAA se voient investis de tous les pouvoirs de surveillance et d’enquête nécessaires à l’exercice de leurs fonctions aux fins de l’application de la loi. Les deux régulateurs sont ainsi en particulier en charge de veiller au respect par leurs entités surveillées des obligations qui sont les leurs en matière de prévention de la dormance et de la déshérence ainsi que du traitement des contrats impactés, en matière de reporting, pour ce qui concerne les mesures transitoires à mettre en œuvre ainsi qu’en matière de conservation des avoirs ainsi que des informations et documents.

Par ailleurs, ils ont le pouvoir d’infliger des sanctions et autres mesures administratives en cas de violation par les professionnels de leurs obligations. Ces mesures comprennent, le cas échéant, notamment : (i) le prononcé d’amendes d’ordre de 250 à 250.000 euros, (ii) une déclaration publique précisant l’identité de la personne physique ou morale ainsi que la nature de la violation, (iii) l’interdiction temporaire d’exercer des fonctions de direction, (iv) des amendes administratives d’un montant maximal de 250.000 euros pour les personnes physiques et de 1.000.000 euros pour les personnes morales.

Les régulateurs sont également habilités à rendre publiques sur leur site internet pendant une période de cinq ans (à l’exception des données personnelles qui devront être effacées au bout de douze mois) lesdites sanctions et mesures.

Enfin, la loi prévoit également des sanctions pénales dans le chef des professionnels qui auraient contrevenu à certaines dispositions particulières, le montant de l’amende variant de 12.500 à 1.000.000 euros.

 

4. Le régime transitoire

La loi instaure finalement des dispositions transitoires particulières visant, d’une part, à exclure du champ d’application de la loi les consignations qui auront valablement été faites préalablement à son entrée en vigueur (i.e. le 1er juin 2022) et, d’autre part, à couvrir les situations pouvant se présenter où une inactivité perdurerait déjà, lors de l’entrée en vigueur de la loi, depuis :

  • plus detrois ans pour un compte donné
  • plus de cinq ans pour le titulaire d’un coffre-fort
  • plus d’un an pour des prestations d’assurance exigibles.

Les professionnels devront donc identifier les contrats existants impactés par ce régime particulier et veiller à mettre en œuvre les mesures transitoires prévues par la loi ; les premières dates butoirs arrivant à échéance le 1er septembre 2022, soit trois mois après l’entrée en vigueur de la loi.

***

Si vous souhaitez échanger sur le sujet, nos experts se tiennent à votre disposition pour vous accompagner. Vous pouvez également revoir le webinaire Legitech « successions vacantes, comptes bancaires dormants et contrats d’assurance non dénoués » présenté par Maître François CAUTAERTS et Maître Ariane WOURWOUKAS avant l’adoption de la loi en suivant le lien ci-après : Cliquez pour visionner le webinaire.Maîtres François CAUTAERTS et Ariane WOURWOUKAS ont par ailleurs publié un article intitulé « SUCCESSIONS « VACANTES », COMPTES DORMANTS ET CONTRATS D’ASSURANCE-VIE EN DÉSHÉRENCE » dans le hors-série de la Revue Internationale du Patrimoine publié en 2020 par Legitech dont une mise à jour devrait paraître prochainement.

[1] L’Annexe II vise les branches d’assurance-vie suivantes : I. Assurances en cas de vie, de décès, assurances mixtes, assurances de rentes – autres que l’assurance nuptialité et natalité – non liées à des fonds d’investissement ainsi que les assurances complémentaires à ces assurances ; II. Assurance nuptialité, assurance natalité ; III. Assurances en cas de vie, de décès, assurances mixtes, assurances de rentes liées à des fonds d’investissement ; IV. Permanent health insurance ; V. Opérations tontinières ; VI. Opérations de capitalisation ; VII. Opérations de gestion de fonds collectifs de retraite.

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